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Bonjour,

C’est toujours l’aïd, deux jours de fête et de piété.

Mon ami Narcisse, entre deux baclawas, me pose encore une question plus simple — heureusement — que celle qu’il m’avait posée au sujet de son compte PPR. Il m'a posé sa question par message privé, car, il appréhende de lire son écriture de peur de s’en éprendre. On connaît la suite si cela lui arrivait.

Bref, sa question du jour est de savoir pourquoi les milliers de Tunisiens, cadres, simples employés, responsables voire jeunes patrons continuent à être exclus de la possibilité de pouvoir détenir en Tunisie un compte en devises dès qu’ils s'installent à l'étranger ?

Le problème que pose Narcisse est directement lié à la notion de résidence automatique ainsi que la définit l’avis de change n° 3 du ministre des Finances du 5 octobre 1982 qui considère qu'un non-résident ne devient légalement un non-résident qu'au bout de deux ans de non-résidence :
Citer

 I — PERSONNES PHYSIQUES
A) Personnes à statut automatique :
a) Sont automatiquement considérés comme “Résidents” :

2°) les personnes physiques de nationalité tunisienne domiciliées hors de Tunisie depuis moins de deux ans et pour lesquelles la qualité de non-résident n’a pas été formellement reconnue par la Banque Centrale de Tunisie ; »


En application des dispositions de l’avis de change n° 5 du 5 octobre 1982, aussi, les jeunes et moins jeunes docteurs, ingénieurs, employés bien que disposant de devises, ne sont pas autorisés à détenir, a priori, un compte en devises ou en dinars convertibles auprès d'une banque en Tunisie car ces comptes sont réservés aux personnes non résidentes et, ce n'est qu'au terme d'un séjour de deux ans qu'ils le pourront.

Avant que ne s’écoulent ces deux années que peut faire le nouveau travailleur à l'étranger ?
Trois possibilités s’offrent à lui selon notre lecture de la réglementation des changes :
  • une version «1975 » — introduite avant la promulgation du code de change de 1976,
  • une version « Code de change primitif», applicable depuis 1976
  • une version «Code de change évolué », souple, de création récente légalement introduite en 2019, jamais mise en œuvre

La version de 1975, le mode dérogatoire
La banque centrale, anticipant les difficultés des nouveaux travailleurs à l’étranger et accédant à leurs requêtes et revendications qu’ils réitéraient à chacun de leurs congrès d’été, décida en 1975, par sa circulaire publiée au journal officiel du 14 janvier 1975 de permettre aux travailleurs tunisiens à l'étranger de disposer de comptes étrangers - ceux prévus par l'avis de change n° 5 avec les modalités suivantes :
  • Aucune condition de durée de séjour n’est exigée pour l’ouverture des comptes +++
  • Une carte consulaire attestant d’une « situation professionnelle régulière » doit être présentée ---
  • Le compte ne peut être tenu qu’en dinar convertible à l'exclusion des devises ---
Cette circulaire est-elle toujours en vigueur ? Oui. Elle est toujours en vigueur en application des dispositions de l'article 3 de la loi 76-18 du 21 janvier 1976 qui stipulent que tous les textes d'application de l'ancienne réglementation demeurent en vigueur jusqu'à ce qu'il en soit autrement décidé. La banque centrale elle-même ne l'envisage pas autrement, elle qui reprend une version retranscrite de la circulaire qu'elle met en ligne sur son site du recueil des textes de la réglementation des changes à sa page 138.
Quelle légalité pour une telle dérogation ? Ce n'est pas important et on ne va pas l'examiner sur la base du code des changes qui a été promulgué l'année suivante quand même (!?!) de la parution de la circulaire. Mais, tel qu'on connait la banque centrale et l'un des responsables des services juridiques de l'époque que le Président de la République connait aussi pour l'avoir désigné par son nom à l'occasion d'une visite qu'il rendait récemment au siège de la banque, on ne peut conclure qu'à sa validité.
On notera sur cet exemple, que les assouplissements des dispositions de la réglementation de change étaient prises non pour quelques uns, mais au profit du plus grand nombre, ici des centaines de milliers de Tunisiens qui ne tenaient qu'à conserver leur épargne en Tunisie plutôt que dans le leur pays d'accueil, plutôt que d'effectuer des virements sporadiques à des frais très élevés
On peut aussi conclure qu'avant le Code de change de 1976, les bonnes mesures se prenaient rapidement, facilement et élégamment (Merci de relire, Narcisse, la circulaire: le mot "article" n'y figure nulle part car, celui à qui elle était destinait n'avait rien à comprendre du charabia juridique. Celui qui devait l'appliquait, le banquier, lui la comprenait car, il comprenait aussi le charabia juridique. Mais ça, c'était avant. Bon, revenons à la question et à la deuxième solution.

La version 2017, le mode strict
La lecture du décret d’application du code de change tel que modifié en 2017 permet d’envisager la procédure suivante :
  •    Prises à la lettre d’abord, les dispositions de l’article 16 de la loi 76-18 du 21 janvier 2016 soumettent le travailleur - résident sur le plan légal mais non-résident au plan de ses intentions - à l’obligation de déclarer ses avoirs à la banque centrale ; il pourra déposer de là où il est — donc de l’étranger — sa déclaration auprès d’un intermédiaire agréé qui se chargera de la remettre à la banque centrale,
  •    Prises à la lettre ensuite, les dispositions du paragraphe premier de l’article 20 de la loi 76-18 — à l’exclusion du second paragraphe qui ne s'applique pas au futur non-résident tant qu'il est résident — soumettent à rapatriement en Tunisie, les revenus ou salaires du travailleur !
  •    Prises à la lettre encore, les dispositions du premier tiret, du quatrième alinéa du second paragraphe de l’article 25 du décret n° 77-608 du 27 juillet 1977, dispensent de l’obligation de cession les salaires et revenus du travailleur afin d’être logées dans un compte en devises ou en dinars convertibles
  •    Prises à la lettre enfin, les dispositions de la circulaire 2017-04 du 26 juin 2017 habilitent les banques à ouvrir au nom du travailleur un compte PPR, Personne physique résidente, en devises ou en dinar convertible, dès la remise de la déclaration de ses avoirs !!!

Sur le plan légal, les dispositions s’enchaînent parfaitement. Mais sur le plan pratique, il est absolument certain qu’aucun nouveau travailleur tunisien à l’étranger n’a emprunté cette voie ni encore moins qu’il se serait soumis à l’obligation de rapatrier en Tunisie de l'intégralité de ses revenus et salaires des deux premières années surtout que rapatriés et logés dans le compte PPR, il lui aurait été interdit de les virer à l'étranger; des fonds voyageant en aller-simple qui ne sied à aucun travailleur d'ailleurs.
Oublions donc cette possibilité et examinons, la toute nouvelle - 5 ans quand même - possibilité

La version 2019, le mode souple
Par décret gouvernemental n° 2019-1115 du 3 décembre2019, une sixième exemption à l’obligation de cession des devises à la banque centrale a été ajoutée, elle s’énonce comme suit : 

Citer
Art. 25 du décret 77-608 du 27 juillet 1977 tel que modifié par le décret gouvernemental 2019-1115 du 3 décembre 2019 :… L’obligation de cession ne concerne pas :

4)… — les devises provenant des revenus des personnes physiques de nationalité tunisienne exerçant une activité professionnelle à l’étranger et n’ayant pas encore acquis la qualité de non-résident au sens de la réglementation des changes en vigueur, qui sont logées dans des comptes en devise ou en dinar convertible.


Comparée aux deux autres solutions, cette nouvelle modalité envisagée par le gouvernement me paraît la plus complète et la plus aboutie à ce jour au regard de la réglementation des changes en vigueur puisqu'elle :
  • Ne nécessite aucune déclaration des avoirs ni de justificatif consulaire que nombre de travailleurs ne sont pas en mesure de présenter au regard des documents qu’exigent les représentations consulaires
  • S’applique tant pour des comptes en dinar convertible qu’en devises
  • Ne soulève pas de difficultés en cas de retour du travailleur, définitif ou non, et est conforme à une vue moderne du contrôle des changes si tant est qu’il doive encore être maintenu ou qu’il sera maintenu
  • Ne soulève pas de difficultés au cas où, à l'inverse le travailleur ne revient pas en Tunisie et qu'il obtient le statut de non-résident au bout de deux ans - aujourd'hui - ou au bout de quelques mois - comme envisagé semble-t-il - puisqu'il pourra convertir son compte PPR en un compte de non-résident

Mais pour des raisons que l’on ignore encore, la banque centrale de Tunisie n’a pas encore mis en application cette disposition depuis 5 ans. Le décret stipule pourtant :

Citer
Art. 25 du décret 77-608 du 27 juillet 1977 tel que modifié par le décret gouvernemental 2019-1115 du 3 décembre 2019 :… L’obligation de cession ne concerne pas :

4)…Les conditions d’ouverture et de fonctionnement de ces comptes sont fixées par circulaire de la banque centrale de Tunisie

Cette situation est inexplicable, en apparence, et insaisissable. Elle lèse les dizaines de milliers de tunisiens, notamment les cadres, ingénieurs et médecins dont la propension d’épargne est élevée qui, ont émigré au cours des dernières années. Sans aucun doute, les réserves en devises ne peuvent que s’accroître en cas de mise en application du décret gouvernemental de 2019.
Le défaut d’actualisation de la circulaire n 2017-04 du 27 juin 2017 qui ne nécessite que la modification de son article 2 et l’insertion de deux lignes à ses deux annexes, interpelle en cette période et notamment au moment où le pays est en quête de ressources extérieures et est appelé à compter sur ses propres moyens et les revenus rapatriés de travailleurs tunisiens à l’étranger en sont un, par excellence.

Une incohérence administrative et réglementaire qui surprend et l'on s’interroge sur les motifs qui n'ont pas permis à ce jour et depuis 5 ans la banque centrale de mettre en œuvre le décret du chef du gouvernement surtout qu'elle a du être consultée en amont.

Un blocage pourquoi ?
L’administration me semble a toujours sa logique, une logique parfois invisible ou dérobée. Un ministre aussi important que celui des Finances et une institution aussi respectable et considérée que la banque centrale ne peuvent oublier de mettre en application la loi ou la réglementation, mais l’un ou l’autre ou les deux peuvent faire des choix.
Le choix ici semble avoir été d’attendre que l’on modifie le code des changes, une modification qui pourrait être salutaire et masquer l’incohérence de la création des comptes PPR qui ont fait subir à des personnes physiques une réglementation uniforme et commune alors que leurs besoins et leurs avoirs et revenus étaient d’origine différente .
L’incohérence c’est aussi d’avoir considéré de fait, que le statut de résident d’un Tunisien était figé qu’il ne pouvait "redevenir non-résident" et que s’il le devenait il devait se faire autoriser par la banque centrale quant au sort de ses avoirs logés dans le compte PPR (dernier paragraphe de l’article 8 de la circulaire n° 2007-04 du 23 juin 2017).
Le Tunisien autorisé a déposer ses avoirs en devises dans un compte PPR par le décret 2019-1115 aurait été celui qui aurait nécessité d’aménager la circulaire afin de tenir compte des deux éventualités envisageables :
  • obtention du statut de non résident (au bout du délai légal qu'il soit aussi court que six mois ou moins ou aussi long que deux ans)
  • retour en Tunisie avant l'obtention du statut de non-résident

Aménager la circulaire pour prendre en considération ces deux situations alors que déjà le texte a été aménagé pour prévoir le cas des étrangers ayant le statut de résident qui devenaient non-résidents (4e tiret du premier paragraphe de l'article 8), aurait rendu peu à peu le texte de la circulaire invisible et, peu à peu ce ne serait plus une circulaire, mais un agencement de circulaires dans un même texte qui à la différence d'une superposition de plusieurs circulaires aurait été incompréhensible même par par les plus avertis et versés dans la réglementation des changes. C'est l'exemple par excellence d'une démarche anticartésienne ou plutôt que de traiter des questions par définition complexes en de plus petites unités gérables cohérentes et intelligibles, on a fait exactement le contraire, complètement.

Remettre en cause par l'administration son choix de fusionner les réglementations du fonctionnement de plusieurs comptes de plusieurs catégories de titulaires - choix qui finalement n'était justifié que par des impératifs cosmétiques même si au passage quelques uns en ont tiré avantage - aurait été une entreprise difficile à ré-entreprendre et à reconnaître.

Aussi, à mon avis, sur cet aspect au moins, le défaut de mise en œuvre de la disposition introduite par le décret n° 2019-1115 du 3 décembre 2019 illustre la situation où le Tunisien subit le formalisme et le "rigidisme" de fâcheuses dispositions réglementaires alors même que le législateur lui a accordé de nouveaux droits, nouveaux droits qui ne profitent pas à lui uniquement, mais au pays tout entier. Ici, le citoyen ne se plie à la loi, mais la loi se plie à son propre mode de conception, ses propres rigidités et ses propres limites par-dessus les intérêts de celui pour qui la loi a été faite et a été conçue, par-dessus les intérêts de l'autre.

Désolé, Narcisse, pour cette conclusion un peu pessimiste et qui nous entraîne vers des considérations moins pratiques et moins terre-à-terre que votre question qui se résume et se réécrit comme suit :
Citer
Pourquoi les milliers de Tunisiens ayant entamé une activité professionnelle à l’étranger ne peuvent-ils toujours pas pas gérer leurs avoirs et revenus obtenus à l'étranger, sans aucun rapport avec en Tunisie, dans des comptes en devises ouverts en Tunisie auprès de banques tunisiennes auxquelles ils confieront ces devises comme le leur a permis le ministre des Finances depuis 2019 et ce sans attendre qu'ils deviennent des non-résidents ?

J'espère que vous avez la réponse et l'explication de la réponse.

A bientôt, Narcisse.

Bonne fête
Joyeux Aïd
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Bonsoir,

Narcisse Fliss, Tunisien, a longtemps, travaillé à l’Étranger avant de revenir en Tunisie et s’y installer. Son compte spécial en devises ouvert à la suite de la déclaration des avoirs qu’il a constitués à l’étranger avant son retour, en principe, définitif a été changé en un compte « Personne Physique Résidente » - PPR - à la demande de sa banque.

Après s’être plié à l’injonction de son conseiller, Narcisse a effectué quelques recherches et s’est posé quelques questions que je reprends succinctement avant de tenter d’y apporter une réponse.

Narcisse s’interroge, à titre personnel, sur la légalité de son nouveau compte et d’une façon générale, sur celle des nouveaux comptes que des milliers de Tunisiens ouvriraient après avoir passé plusieurs années à l’étranger en réussissant leur insertion, se constituent un patrimoine puis changent de résidence. En effet :
  •    la possibilité de déposer dans un compte tenu auprès d’une banque en Tunisie des avoirs constitués à l’étranger par un ex-non résident tunisien n’est prévue que dans le cas de l’accomplissement de la formalité de déclaration de ces avoirs à la banque centrale de Tunisie selon l’article 25, paragraphe 2 (nouveau) 4) premier tiret du décret n° 1977-608 du 27 juillet 1977,
    Citer
    Article 25 (nouveau) du décret 77-608 du 27 juillet 1977 ...
    L'obligation de cession ne concerne pas : ...
    4) Les devises provenant de l'un ou de plusieurs des revenus cités ci-après ... :
    - les revenus ou produits des avoirs à l'étranger ainsi que les avoirs en devises à l'étranger déclarés à la banque centrale de Tunisie conformément aux articles 16 et 18 du code des changes et du commerce extérieur ou à toute disposition législative spéciale,
    ...

  •    l’obligation de déclaration des avoirs qui ont été constitués à l’étranger avant le changement de résidence a été abolie — art. 18 nouveau Loi 76-18 du 21 janvier 1976 qui ne vise désormais plus que les déclarations des personnes morales.
    Citer
    Article 18 de la loi 76-18 du 21 janvier 1976 : Toute personne morale étrangère pour chaque établissement nouvellement créé en Tunisie est tenue de faire, s’il y a lieu, la déclaration prévue par l’article 1 et ce dans un délai ne dépassant pas six mois à compter de la date de création du nouvel établissement.
    et n’a plus aucune réalité juridique pour les ex-non -résidents tunisiens d’autant que simultanément, aucune obligation de rapatriement n’est prescrite pour les personnes physiques selon les nouvelles dispositions du second paragraphe de l’article 20 de la loi
    Citer
    Article 20 de la loi 76-18 du 21 janvier 1976 : ...
    Sont dispensées de l’obligation de rapatriement des revenus à l’étranger les personnes physiques de nationalité tunisienne transférant leur résidence habituelle de l’étranger en Tunisie et les personnes physiques de nationalité étrangère résidentes en Tunisie au titre des avoirs constitues à l’étranger avant la date du changement de résidence.

  •    les comptes dont la banque centrale de Tunisie a, par sa circulaire n° 2017-04 du 23 juin 2017, définit les conditions d’ouverture et de fonctionnement ouverts après une déclaration d'avoir ne sont plus, au plan légal, que les seuls comptes dont les titulaires ont rempli la formalité de déclaration prévue à l’article 16 de la loi 76-18 du 21 janvier 1976 exclusivement, c'est-à-dire qu'il ne s'agit que des comptes des personnes qui sans avoir non résident viennent à disposer d'avoirs suite à une succession ou à un don et qu'il ne s'agit pas des tunisiens qui étaient auparavant non résidents ?
    Citer
    Article 16 de la loi 76-18 du 21 janvier 1976 : Tout tunisien ayant sa résidence habituelle en Tunisie, toute personne morale tunisienne ainsi que toute personne morale étrangère pour ses établissements en Tunisie est tenu de déclarer à la Banque Centrale de Tunisie tous ses avoirs à l'étranger dans un délai de six mois à compter de la date de promulgation du présent Code, ou de leur acquisition quand celle-ci est postérieure à la date de promulgation du présent Code
  •    la validité de l’instruction donnée aux banques – Annexe 1 de la circulaire n° 2017-04 - de n’exiger que la présentation du « passeport entier » pour l’ouverture d’un nouveau compte « Personne Physique Résidente » et non la déclaration prévue par le décret 77-608 telles que modifiées par le décret n° 2017-393 du 28 mars 2017 (l’article 25, paragraphe 2 [nouveau] 4) premier tiret), ne se pose-t-elle pas ?
    Citer
    Annexe 1 de la circulaire 2017-04 du 23 juin 2017 : Documents à fournir lors de l’ouverture d’un compte de Personne Physique Résidente –P.P.R en devises ou en dinar convertibles
    • copie de la carte d’identité nationale pour les personnes de nationalité tunisienne
    • ...
    • Les personnes transférant leur résidence habituelle de l'étranger en Tunisie : Copie du passeport en entier
  •    la banque centrale a-t-elle été réellement  chargée par le décret n°2017-393 signé par le chef du gouvernement et contresigné par la ministre des finances de définir les conditions d’ouverture et de fonctionnement de comptes de personnes de nationalité tunisienne qui transfèrent leur résidence de l’étranger en Tunisie pour y loger les revenus ou produits des avoirs à l'étranger ainsi que les avoirs à l'étranger qui n'ont pas été déclarés conformément aux articles 16 et 18 du code des changes ?

La réponse est dans les questions, posées d’une façon aussi précise, Narcisse.

S’agissant de la transformation des comptes spéciaux en comptes PPR, l’instruction de la banque centrale, prévue à l’article 15 de la circulaire n° 2017-04 du 23 juin 2017 est parfaitement conforme aux dispositions du décret 77-608 du 27 juillet 1977 tel que modifiée par le décret n° 2017-393 du 28 mars 2017. En effet, les comptes spéciaux ouverts avant la parution de la circulaire n° 2017-04 ont été ouverts sur présentation de la déclaration prévue aux articles 16 et 18 de la loi 76-18 du 21 janvier 1976 ou de l’attestation prévue à l’article 16 de la loi n° 86-33 du 1er septembre 1986 portant loi de finances rectificative pour l’année 1986.
Citer
Article 15 de la circulaire 2017-04 du 23 juin 2017: Les Intermédiaires Agréés doivent procéder, au plus tard le 31/12/2017, à la transformation en comptes P.P.R des comptes ouverts sur leurs livres au nom des personnes physiques, dans le cadre des circulaires suivantes :
- la circulaire n°87-37 du 24 septembre 1987 relative aux comptes spéciaux en devises et en dinars convertibles
...
Pas de souci donc au sujet de la transformation des comptes PPR ouverts sans autorisation particulière de la BCT mais sur présentation d'une déclaration, Narcisse. Comme on le verra plus loin, c'est hélas, cette absolue conformité qui est quelque peu problématique.

Pas de souci non plus, comme vous l’avez pressenti, pour l’ouverture des comptes PPR au nom des tunisiens résidents qui acquièrent des avoirs à l’étranger sans avoir changé de résidence comme dans le cas d’une succession ou d’une donation faite à l’étranger. C’est d’ailleurs ainsi que la banque centrale le conçoit puisqu’elle exige pour ces personnes la présentation de la déclaration — Annexe 1 de la circulaire 2017-04, quatrième alinéa.
Citer
Annexe 1 de la circulaire 2017-04 du 23 juin 2017: Documents à fournir lors de l’ouverture d’un compte de Personne Physique Résidente –P.P.R en devises ou en dinar convertibles
• copie de la carte d’identité nationale pour les personnes de nationalité tunisienne
...
• Les tunisiens ayant des avoirs acquis régulièrement à l’étranger: Copie de la déclaration d’avoir telle que prévue par l’article 16 du code des changes établie dans un délai maximum de 6 mois à partir de la date d’acquisition de l’avoir1.

Par contre, à mon avis, la banque centrale n’a pas été appelée dans le décret 77-608 tel que modifié par le décret 2017-393 à définir les conditions d’ouverture et de fonctionnement des comptes de personnes physiques de nationalité tunisienne dont les fonds destinés à y être logés à leur ouverture ne font pas l’objet de la déclaration prévue aux articles 16 et 18 de la loi 76-18 du 21 janvier 1976. Or, les avoirs dispensés de déclaration sont précisément ceux des Tunisiens transférant leur résidence habituelle de l’étranger en Tunisie à partir de la date d’entrée en vigueur du décret-loi n° 2011-98 du 24 octobre 2011. Ces avoirs ne sont pas visés par l’article 25 du décret 77-608 du 27 juillet 1977 cité ci-dessus pour être versés dans les comptes PPR tels qu’énumérés à puisque celui subordonnent leur versement à l'accomplissement de la formalité de déclaration.
Pour ces avoirs, selon notre analyse, la circulaire est sans objet dés lors que le décret n'a pas instruit la banque centrale de définir les modalités d'ouverture des comptes pouvant abriter cette catégorie d'avoirs et revenus, le décret 77-608, rappelons-le avec insistance, n'a pas envisagé cette catégorie de fonds dans son article 25 modifié en 2017 d'ailleurs pas même avant, en 2011, ni après.

Les avoirs des tunisiens dont la résidence habituelle change de l'étranger à la Tunisie  ne sont pas en outre concernés par l'obligation de cession des devises et sa dispense qui sont traitées à l'article 25 du décret 77-608 du 27 juillet 1977.
En effet, Il est à rappeler que l'article 25 s'inscrit dans la même logique qui a prévalu depuis la promulgation du code des changes en 1976 et dans des dispositions identiques d'autres textes avec celle appliquée en Tunisie sous protectorat malgré que le pays ait acquis son indépendance. Avec les "assouplissements" introduits, cet article a abrité les exceptions, d'années en années à partir de 1987, des avoirs et revenus soumis à obligation de rapatriement mais dispensés de l'obligation de cession des devises à la banque centrale.

Or, les fonds dont il s'agit concernent des avoirs dispensés de l'obligation de rapatriement et donc sont automatiquement affranchis de l'obligation de cession à la banque centrale sans qu'aucune instruction ne vienne le préciser, c'est un automatisme technique propre aux devises convertibles qu'on ne peut convertir en dinars tunisiens si on ne les rapatrie pas auparavant en Tunisie. Juridiquement et techniquement les avoirs des ex non résidents ne sont en aucun cas visés par les dispositions de l'article 25 du décret 77-608.

L'assouplissement introduit par le législateur - avant même que ne soit soufflée la première bougie de la "Révolution" dans une optique qui devait clairement enclencher dans les mois suivants la quasi abrogation du code des changes - par le décret-loi n° 2011-98 du 24 octobre 2011 constitue, d'ailleurs, une innovation et une évolution majeure de la réglementation des changes et de son esprit aussi importante que la libéralisation des opérations courantes en 1993 et auxquelles l'administration ne semblait pas être préparée.

Ainsi, à ce jour le ministère concerné et la banque centrale qui ont été chargés par l'article 3 du décret-loi de son exécution n'ont pas introduit les modifications induites au niveau du décret 77-608 d'application de la loi 76-18 et, par voie de conséquence, le fondement juridique des circulaires d'application de la banque centrale. [/b]
Citer
Art. 3 du décret-loi n°2011-98 du 24 octobre 2011 – Le ministre des finances et le gouverneur de la banque centrale de Tunisie sont chargé, chacun en ce qui le concerne, de l’exécution du présent décret-loi ...

D'où vos interrogations légitimes, Narcisse, auxquelles nous avons tenté de répondre et d'identifier, quelque peu, le contexte dans lequel elles se posent.

D’ailleurs, pour compléter vos propos, aurait-il été concevable que pour les Tunisiens ex-non résidents leur soit interdite toute possibilité de débiter leur compte PPR pour alimenter un compte bancaire à l’étranger alors qu’ils sont désormais autorisés à conserver tous leurs comptes à l’étranger  et de choisir sans contrainte - au niveau change - ce qu'ils souhaitent conserver en Tunisie et à l’Étranger? Pourtant, c’est bien ce que prévoit l’article 8. de la circulaire qui stipule pour tous les comptes ouverts :
Citer
Art. 8. de la circulaire 2017-04 du 23 juin 2017, premier paragraphe, troisième tiret :... … le titulaire du compte ne peut en aucun cas constituer des avoirs en comptes bancaires à l'étranger :

La banque centrale si elle est habilitée à accorder des autorisations particulièresne nous semble pas en l'état actuel de la réglementation ni même dans un état de droit où la hiérarchie des textes est respectée, pouvoir restreindre par un texte réglementaire - une circulaire - les droits accordées par une loi. d'autant plus que la loi 76-18 a bien délimité les prérogatives et le cadre de l'intervention du ministre des Finances et de la Banque centrale à ses articles premier (dernier paragraphe) et article 2 qui stipule:
Citer
Article 2 : Des décrets pris sur proposition du Ministre des Finances et après avis de la Banque Centrale de Tunisie définissent les opérations considérées comme constituant une exportation de capitaux aux termes de l'article premier et peuvent édicter toutes prohibitions, obligations et règlementations en vue de mettre en œuvre les dispositions de la présente loi.

En conséquence, et sachant que la banque centrale n'ignore nullement ces dispositions et qu'au contraire, elle a toujours veillé à renforcer l'application de la loi et son respect, la circulaire n°2017-04 semble comporter des incohérences qu'il y aurait lieu de lever et sur lesquelles le "Comité de contrôle et de la conformité" prévu par l'article 42 de la loi 2016-35 du 25 avril 2016 portant fixation du statut de la Banque centrale de Tunisie devrait être invité à se pencher même si, d’après les visas de la circulaire 2017-04, il a déjà émis un avis favorable sans que celui-ci ne soit mis à la disposition du public ou annexé à la circulaire.

La levée des incohérences et la mise en conformité de la circulaire et celle du décret 77-608 devraient, à mon avis, être entreprises sans même attendre que la loi portant réglementation des changes et ses textes d'application ne soient modifiées comme il semble que l'opinion y a été préparée depuis l'annonce depuis des années d'une modification du code des changes et qui désormais a eu l'effet pervers de bloquer la prise de mesures régulières, habituelles et nécessaires dont l'économie et les opérations financières auraient eu besoin. Le changement du code est une chose - très importante d'ailleurs - la gestion de la loi et de la réglementation au quotidien en est une autre.

Ainsi et d'ailleurs, toujours dans le cadre que vous avez abordé, Narcisse, il semble que la législation actuelle relative aux avoirs des Tunisiens qui ont changé de résidence, est globalement incomplète: elle n’envisage pas toutes les possibilités que la profusion de dispositions réglementaires permet d’envisager car, en sus du sort des avoirs volontairement rapatriés – en tout ou en partie – de l’étranger par les tunisiens — dont on ne connaît, légalement la destination — la question peut aussi se poser pour les avoirs qui étaient déposés dans les comptes étrangers en devises et en dinar convertible ouverts en Tunisie auprès des banques tunisiennes. Leur destination pourrait être le compte PPR comme en a fait le choix la banque centrale en attendant la confirmation légale, mais, il se pourrait que l’on puisse envisager un autre type de compte. Les autorités marocaines, pour ne citer que l’exemple de ce pays, ont prévu la création de comptes dits ex-MRE (Marocains Résidant à l’Étranger) équivalents à ex-TRE (Tunisiens Résidant à l’Étranger) qui abritent les avoirs auparavant logés dans les comptes étrangers  ainsi que les fonds éventuellement rapatriés de l’étranger.

Voilà Narcisse, une tentative d’apporter une réponse à vos interrogations. Désolé d'avoir été un peu long mais, cela était nécessaire afin que vous - et d'autres - puissiez apporter la critique qui permettrait d'améliorer la réponse.

Comme je ne doute pas que vous aurez d’autres questions, je vous dis à bientôt et,

Bonne fête de l’Aïd.
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Partage de successions / Re : Re : Re : Retirer sa part d'héritage à la banque
« Dernier message par Sofiane le 07 avril 2024, 04:44:29 pm 16:44 »
Merci beaucoup pour la réponse très détaillée, cela m'aide énormement.
J'ai lu qu'il y a un délai de 10 ans pour réclamer un héritage.

Bonjour,
Franchement, je n'ai personnellement pas connaissance de ce délai.
Vous pouvez consulter cet échange au sujet des délais : https://www.jurisitetunisie.com/se/index.php?topic=266.msg778#msg778

Mes respects

Merci pour votre réponse. Je me suis probablement trompé car je n'arrive pas à retrouver l'article mentionnant une durée de 10 ans.
Je vais suivre votre conseil et contacter un notaire pour la succession de la propriété. Malgré nos recherches, nous n'avons pas pu retrouver le titre de propriété de mon père. Savez-vous s'il est possible de faire un duplicata du titre de propriété?
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Bonjour Salim,

Ce n’est plus un simple commentaire, mais une véritable analyse avec une pointe de malice.

Effectivement, comme tout marché, le marché parallèle des devises répond à un besoin et doit aboutir à neutraliser des déséquilibres.

Les acteurs du marché des changes qualifiés de délinquants parce que la loi a décidé d’en faire des délinquants en les désignant ainsi par des dispositions réglementaires rendent bien plus service au pays que ceux qui sont sensés le faire à travers une activité qu’ils ne sont plus libres de réaliser ou qu’ils réalisent à leurs dépens et au profit d’acteurs qu’il serait pénible de désigner.

Je suivrais avec le plus grand intérêt vos analyses, car, il est évident que le meilleur semble avoir été réservé pour la fin depuis que vous avez décidé de ne pas mettre en ligne votre commentaire global sur les objectifs désignés par le chef du gouvernement.

Bonne continuation.

Abdou
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Partage de successions / Re : Re : Retirer sa part d'héritage à la banque
« Dernier message par Jamal le 05 avril 2024, 10:00:33 am 10:00 »
Merci beaucoup pour la réponse très détaillée, cela m'aide énormement.
J'ai lu qu'il y a un délai de 10 ans pour réclamer un héritage.

Bonjour,
Franchement, je n'ai personnellement pas connaissance de ce délai.
Vous pouvez consulter cet échange au sujet des délais : https://www.jurisitetunisie.com/se/index.php?topic=266.msg778#msg778

Mes respects
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Partage de successions / Re : Retirer sa part d'héritage à la banque
« Dernier message par Sofiane le 04 avril 2024, 11:50:46 pm 23:50 »
Merci beaucoup pour la réponse très détaillée, cela m'aide énormement.
J'ai lu qu'il y a un délai de 10 ans pour réclamer un héritage. Une fois les 10 ans passes (à compter de la date de décès), l'Etat s'empare des biens (argent et biens immobiliers). Nous atteindrons les 10 ans dans le courant de l'année 2024. 
En supposant que la banque refuse de verser sa part d'héritage a mon frère lors de sa prochaine visite en Tunisie, que doit-on faire pour éviter que l'Etat ne s'empare de l'argent?
Et y-a-t-il de même une action que nous devons faire auprès des autorités pour éviter que l'Etat ne s'empare de la maison?
Je suis raisonablement optimiste pour l'argent dans le compte en banque mais régler la succession de la maison prendra du temps.
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Partage de successions / Re : Retirer sa part d'héritage à la banque
« Dernier message par Jamal le 03 avril 2024, 12:17:23 pm 12:17 »
Bonjour,

La succession de votre père va être partagée entre ses 2 fils dont vous-même, votre sœur, son épouse (votre mère), sa mère (votre grand-mère paternelle) et à concurrence de la part de son père (votre grand-père) entre ses héritiers (à savoir votre grand-mère, ses fils et ses filles càd vos oncles et tantes).

Dés lors que votre grand-père avait des enfants, vous n'héritez pas de la partie de la succession provenant du patrimoine de votre père (les disponibilités en compte et la maison). Par contre, vous allez avec votre sœur et votre frère hériter de la part qu'aurait obtenue votre père s'il avait survécu à votre grand-père. Cette part peut être supérieure ou inférieure à ce que vos oncles et tantes vont prélever dans la succession de votre père.

Le plus simple est traiter les deux successions simultanément et de trouver un accord de partage entre tous les héritiers compte tenu de l'existence de ces droits interdépendants.

La question se posera notamment pour l'immeuble.

L'intervention d'un professionnel est dans ce vivement souhaitable.

Cependant en cas d'urgence, il est possible en cas d'accord avec la banque de retirer la part de chacun au titre des disponibilités du compte et laisser pendante la part de votre grand-père qui de toute façon, en dehors de l'accord envisagé ci-dessus va revenir à ses héritiers. Pour le retrait de la somme correspondante, vous pourrez bien sûr donner un mandat à votre frère dûment enregistré au consulat de Tunisie de votre lieu de résidence. La seule obligation est que le dossier mis à la disposition de la banque soit complet c'est-à-dire qu'il comporte tous les extraits de naissance des personnes concernées à savoir:
1. Certificat de décès délivré par la municipalité sur présentation d’une déclaration de l’hôpital ou du médecin de famille.
2. Certificat d’hérédité par le juge cantonal désignant les personnes ayant la qualité d’héritiers. Les formalités et documents nécessaires : 2 témoins, copies des actes de naissances des héritiers, copies de l’acte de décès établi par la municipalité tunisienne.

Pour l'immeuble, il s'agit de modifier le titre de propriété afin d'y inscrire les nouveaux propriétaires. L'intervention d'un professionnel est quasiment requise dans ce cas. Pour ce qui est de la céder votre part d'héritage vous pourrez le faire une fois que vous aurez hérité car vous êtes un héritier obligatoire et nécessaire. Faire la cession de votre part dans l'immeuble avant que vous n'en soyez copropriétaire est vivement déconseillée.

Nos respects
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Partage de successions / Retirer sa part d'héritage à la banque
« Dernier message par Sofiane le 02 avril 2024, 10:32:24 pm 22:32 »
Bonjour,

Mon père est décédé il y a plusieurs années. Les héritiers de mon père au moment de son décès étaient mes grands-parents paternels, ma mère, mon frère, ma sœur et moi-même. Mon grand-père est décédé par la suite (alors que la question de la succession de mon père n’était toujours pas résolu. Depuis le décès de mon grand-père, les héritiers de l’héritage de mon père sont ma grand-mère, mes oncles et tantes (frères et sœurs de mon père), ma mère, mon frère et ma sœur.
L’héritage de mon père est constitué d’un compte en banque et d’une maison. Mon frère va se rendre en Tunisie dans peu de temps. Pourriez-vous m’eclairer sur les points suivants:

a)   Est-ce que mon frère peut récupérer sa part de l’héritage (calcule selon la loi tunisienne) lorsqu’il va se rendre à la banque ? Ou y-a-il besoin d’un accord de tous les héritiers avant que la banque ne puisse transférer sa part d’héritage a mon frère? Le document « hoja el wafat » a déjà été produit.
b)   Je souhaite céder ma part d’héritage a mon frère. Puis-je simplement aller au consulat de Tunisie a Paris pour faire légaliser une déclaration dans laquelle je cède ma part d’héritage ?

Pour être complet, tout le monde est tunisien excepté ma mère qui n’est pas tunisienne  mais est musulmane. Merci d'avance.
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Commentaire des textes et projets / Code des changes : 4. Mieux mobiliser les capitaux extérieurs
« Dernier message par Salim1980 le 02 avril 2024, 08:10:59 pm 20:10 »
Source : Page officielle de la présidence du Gouvernement tunisien - 18 mars 2024

Bonjour,

Citer
Mieux mobiliser les capitaux extérieurs.

Tel est le quatrième objectif qu’assigne la présidence du gouvernement à la modification ou abrogation/remplacement du code des changes adopté par le conseil des ministres du 14 mars 2023.

Étonnant. Je m’interroge sur la nature de l’objectif ainsi assigné qui ne peut à mon sens que se rapporter aux possibilités dont pourraient bénéficier les entreprises résidentes à mobiliser des ressources d’emprunt sur les marchés financiers étrangers.

Les Investissements directs étrangers auxquels pourrait penser, ne sont pas considérés en tant que « capitaux extérieurs », car leur contenu est très diversifié et ne sont pas uniquement constitués de capitaux, du moins pour ce qui concerne la Tunisie et la nature des investissements directs qu’on y fait. Donc, nul besoin d’envisager pour cet objectif tel que libellé, les IDE mais simplement les emprunts extérieurs.

S’agissant des emprunts des emprunts de l’État, une procédure particulière leur est appliquée. Donc, nul besoin de les envisager dans ce commentaire.

Ne sont utilement à considérer, pour notre sujet, que les emprunts extérieurs des entreprises résidentes. Or, voilà trente ans que les entreprises ont été autorisées à contracter des crédits extérieurs. En effet, le décret n° 93-1696 du 16 août 1993 a modifié le décret n° 77-608 du 21 janvier 1976 en y ajoutant un article 17 bis ainsi libellé :
Citer
Article 17 bis : Les entreprises résidentes sont autorisées à contracter des crédits extérieurs pour les besoins de leurs activités et dans les limites et les conditions qui sont fixées par circulaire de la Banque Centrale de Tunisie.
Les limites et les conditions des emprunts extérieurs des entreprises ont été fixées par la Banque centrale de Tunisie par sa circulaire n° 93-16 du 7 octobre 1993 modifiée à deux reprises ainsi que l’indique le site de la Banque centrale consulté ce jour.

Il semble cependant que selon la circulaire Circulaire aux intermédiaires agréés n° 2020-13 du 2 juin 2020 publiée au journal officiel de la République n° 56 du 16 juin 2020, la circulaire n° 93-16 du 7 octobre 1993 mentionnée sur le site de la BCT a été abrogée. Les nouvelles conditions et limites d’emprunt applicables aujourd’hui se présentent comme suit :

Montant plafond des emprunts pouvant être contractés sans autorisation de la BCT
(en Millions de dinars)
Durée de
  remboursement
12 mois au plus   Plus de 12 mois
Cotées en bourse ou
ayant une notation
OuiNon
Banques  25Néant30
Autres  105030
   
Il ressort ainsi que si mon interprétation de l’objectif est correcte — et il ne me semble pas qu’il y en ait une autre — une « meilleure mobilisation des capitaux extérieurs » ne peut figurer parmi les objectifs visés par le nouveau code des changes adopté par le conseil des ministres du 14 mars 2024, car, depuis 1993, les emprunts extérieurs ne sont plus soumis à une autorisation systématique de la Banque centrale de Tunisie ainsi qu’en dispose l’article 17 bis du décret 77-608 du 27 juillet 1977.
Par ailleurs, la Banque a, au cours des trente années qui ont suivi cette libéralisation, assoupli à trois reprises les conditions des emprunts qui peuvent être réalisés sans son autorisation. La meilleure mobilisation future des ressources extérieures qu’elle soit liée aux montants des plafonds des emprunts et leur relèvement ou liée à l’assouplissement des conditions ne relèvent actuellement que des attributions exclusives de la Banque.

S’exprimant lors d’un webinaire, organisé récemment par l’IACE, sur le thème «Est-ce que le nouveau code des changes répond aux aspirations des opérateurs économiques ?», Sonia Zoghlami, directrice générale au ministère des Finances, a informé l’assistance qu’il est prévu de supprimer le plafond du montant que les entreprises non cotées en bourse pourront mobiliser. (Source : La Presse.tn)

Or, cette mesure relève des attributions de la Banque centrale et peut être introduite que le nouveau code des changes soit ou non adopté par l'Assemblée des Représentants du Peuple et si comme l'estiment les autorités, la mesure est bénéfique aux entreprises, et contribue à réduire les besoins en financements extérieurs de la Tunisie, il n'y a aucune raison d'attendre encore l'adoption du nouveau code des changes.

On est quelque peu surpris qu'un haut fonctionnaire inscrive cet assouplissement parmi ceux que la modification du code des changes va apporter du moment que toutes les libertés de conclure des emprunts à l'étranger ont déjà été données par le décret d'application actuel du code des changes et que par conséquent la possibilité d'améliorer les conditions de ces emprunts ne relèvent plus du code des changes mais de ses textes d'application et donc du ministère des Finances et de la banque centrale, cette dernière en particulier.
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Source : Page Facebook de la Présidence de la République de Tunisie

Le public a finalement été informé au sujet du déroulement de l’audit général des recrutements et des intégrations dans la fonction publique entre le 14 janvier 2011 et le 25 juillet 2021. Il n’est pas question de remise du rapport qui aurait dû avoir lieu le 21 mars 2024 selon les calculs de l’administrateur des forums, mais uniquement des difficultés qui ont émaillé les opérations d’audit, et ce, selon le communiqué de la Présidence de la République lu sur sa page Facebook.

C’est M. Imad Al-Hazqi, l’un des membres de la Commission ad hoc constituée afin de réaliser l’audit qu’a échu la charge d’informer Le Président de la République sur ces difficultés. M. Ahmed Hachani n’a donc pas assisté à l’entrevue.

En tout état de cause, il semble que l’opération n’a pas abouti en raison de la réticence des fonctionnaires a contribuer à la réalisation de l’audit puisque selon le communiqué le taux de défaut de réponse est de 40 %.

Ce taux est excessivement élevé et on peut d’ores et déjà conclure que l’audit n’a pu être finalisé, car le taux attendu de fraudes aux recrutements et de non-respects des conditions des concours et des fraudes et falsifications qui les ont émaillés d’après les commentaires des différents intervenants, ministres et ex-ministres est inférieur à ce taux et donc les défauts de réponse couvrent largement les cas des nouvelles fraudes.

D’autres solutions devraient peut-être prises, moins imposante et plus discrètes, elles devraient aussi faire appel à la délation. Rapidement, le dossier sera alors clos, nous semble-t-il. Mais cette solution pour autant qu’elle sera efficace rencontrera une forte opposition dans l’administration et ailleurs puisque les opportunistes du chaos ne chômeront pas.

La lutte contre la corruption n’est pas du tout aisée, en Tunisie comme ailleurs pas tant en raison du nombre de corrompus et de corrupteurs, mais en raison du nombre d’intrigants, manœuvriers et manipulateurs, en quête d’occasions pour se manifester et perturber toute action correctrice menée en recourant aux outils légaux.
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