Législation-Tunisie

Loi n° 2009-69 du 12 août 2009, relative au commerce de distribution .

Journal Officiel de la République Tunisienne n° 65 du 5 février 2009, page 2349 à 2352.


La chambre des députés et la chambre des conseillers ayant adopté,

Le Président de la République promulgue la loi dont la teneur suit :

CHAPITRE PREMIER - Dispositions générales

Article premier. - La présente loi fixe les règles régissant l’exercice des activités du commerce de distribution en vertu desquelles la liberté constitue le principe et l’autorisation constitue l'exception. Elle vise notamment la modernisation, la mise à niveau du secteur commercial et la garantie de l’équilibre entre les différents intervenants du secteur.

Art. 2. - Est considéré commerce de distribution, au sens de la présente loi, toute activité exercée à titre professionnel se rapportant à l’achat de produits afin de leur revente en l’état soit en gros soit en détail.
Est soumise aux dispositions de la présente loi, toute activité exercée à titre habituel et à but lucratif et se rapportant à l’achat de produits afin de leur revente en l’état.
Est considéré commerçant distributeur grossiste tous commerçant, selon l’usage professionnel procède à des achats de produits ou de marchandises en gros auprès des producteurs locaux ou à travers l’importation afin de leur revente en gros.
Est considéré commerçant distributeur détaillant tous commerçant, selon l’usage professionnel met à la disposition du public et leur vend les produits et marchandises achetés auprès d’un commerçant distributeur grossiste, d’un producteur ou à travers l’importation.

CHAPITRE 2 - De l’exercice de l’activité du commerce de distribution

Art. 3. - Sans préjudice aux dispositions de l’article premier de la présente loi, l'exercice de certaines activités commerciales peut être organisé par des cahiers des charges approuvés par arrêté du ministre chargé du commerce et comprenant notamment les conditions techniques pour l’exercice de l'activité.

Art. 4. - Le commerçant distributeur est tenu de notifier au ministère chargé du commerce le démarrage de son activité dans un délai d’un mois. Il est tenu de l’informer dans le même délai de tout changement se rapportant à l’activité. La notification doit comporter le nom du promoteur, la nature de l’activité, l’adresse du local, sa superficie et le numéro d’immatriculation au registre de commerce.
Pour l'activité de commerce de distribution par voies électroniques, la notification s’effectue par le dépôt d'une copie du contrat d'hébergement du site commercial dans un délai d’un mois de sa date de conclusion. Toute modification apportée au site web doit être notifiée dans le même délai.

Art. 5. - Sans préjudice à la législation spécifique, l’activité de commerce de distribution est exercée au stade du gros ou au stade du détail.
En cas de cumul entre les deux stades, la séparation entre les locaux de vente en gros et les locaux de vente en détail est obligatoire ainsi que la tenue d’une comptabilité distincte pour chaque stade.

Art. 6. - Tout commerçant distributeur est tenu de placer son enseigne commerciale sur la façade de tous ses établissements et sur son site Web. Ladite enseigne doit mentionner notamment son nom commercial et son secteur d’activité.
Ces mêmes mentions doivent être indiquées sur ses correspondances et sur tous ses documents comptables, commerciaux et administratifs.
Sont dispensées de cette obligation les personnes physiques dont le chiffre d’affaires annuel ne dépasse pas un seuil qui sera fixé par décret.

Art. 7. - Le producteur ne peut pas au niveau de son entreprise de production et en sa qualité de producteur, exercer l’activité du commerce de distribution en gros ou au détail, telle que définie par la présente loi.
Les dispositions du présent article ne s’appliquent pas aux producteurs agricoles et aux artisans pour la vente de leur propre production.
Toutefois, le producteur peut vendre directement au consommateur selon des conditions et des modalités qui seront fixées par décret.
En outre, le ministre chargé du commerce peut, pour des considérations conjoncturelles liées à l’intérêt général ou à l’occasion de manifestations commerciales, autoriser aux producteurs des dérogations pour la vente directe de leur propre production aux consommateurs.

Art. 8. -Conformément à la réglementation en vigueur, le commerçant distributeur est tenu de garantir au consommateur les services après vente et de fournir les pièces de rechange nécessaires pour les produits et marchandises qu’il commercialise.

Art. 9. - Le commerce de détail ambulant peut être exercé après l'obtention d’une carte de commerçant détaillant ambulant. Les conditions et les procédures d'exercice de cette activité seront fixées par arrêté conjoint du ministre de l'intérieur et du développement local et du ministre chargé du commerce.
Est considéré, commerçant détaillant ambulant au sens de la présente loi, toute personne physique qui ne dispose pas d’un local commercial permanent et qui procède à titre professionnel à l’achat de produits afin de leur revente en l’état dans des espaces réservés à cet effet et en utilisant des équipements démontables ou transportables.

CHAPITRE 3 - Des centres commerciaux

Art. 10. - Est soumise à une autorisation préalable délivrée conformément à l’article 11 bis du code le l’aménagement du territoire et de l’urbanisme, toute implantation d’un centre commercial dont la base de construction dépasse 3000m² lors de son édification ou après son extension ou dont la surface de base réservée à la vente dépasse 1500m².
Est considéré centre commercial tout espace ou immeuble comprenant un ou plusieurs étages, aménagé et composé de plusieurs locaux indépendants réservés à la commercialisation de divers produits et à la prestation de services.

Art. 11. - Est créée une Commission Nationale d’Urbanisme Commercial chargée d’émettre un avis sur les demandes d’autorisation prévues par l’article 10 de la présente loi et par l’article 11 bis du code de l’aménagement du territoire et de l’urbanisme.
La composition et les modes de fonctionnement de ladite commission seront fixés par décret sur proposition du ministre chargé du commerce et du ministre chargé de l’aménagement du territoire et de l’urbanisme.

CHAPITRE 4 - Des relations commerciales

Art. 12. - Les délais de paiement convenus entre les producteurs et les distributeurs, ne doivent pas dépasser les délais suivants :

  • trente jours à compter de la date de la livraison pour les produits alimentaires,
  • quatre-vingt dix jours à compter de la date de la livraison pour les meubles et les articles électroménagers,
  • soixante jours à compter de la date de la livraison pour les autres produits.

Toute clause contraire est considérée nulle.

Art. 13. - Les services fournis dans le cadre des relations de coopération commerciale doivent faire l’objet d’une facturation séparée de la facturation de l’achat du produit et doit comporter la nature du service rendu, les réductions accordées et le coût du service de chaque produit.
Sont considérées relations de coopération commerciale, les services commerciaux suivants fournis par le commerçant distributeur au fournisseur :

  • les opérations publicitaires effectuées dans les locaux de vente ou à l’extérieur,
  • la présentation du produit en tête de gondole,
  • les ventes et les opérations promotionnelles à l’intérieur du local.

CHAPITRE 5 - Des contrats de franchise

Art. 14. - Le contrat de franchise est un contrat par lequel le propriétaire d’une marque ou d’une enseigne commerciale accorde le droit de son exploitation à une personne physique ou morale dénommée franchisé, et ce, dans le but de procéder à la distribution de produits ou à la prestation de services moyennant une redevance.
Le droit d’exploitation de la franchise comprend le transfert des connaissances acquises, le savoir faire et l’exploitation des droits de la propriété intellectuelle.
Est considéré réseau de franchise l’ensemble des commerces indépendants exerçant sous la même marque et selon des méthodes commerciales unifiées dont notamment l’aménagement des locaux, les modes de gérance, l’exposition, le marketing et les sources d’approvisionnement.

Art. 15. - Le contrat de franchise doit être écrit.
Le franchiseur est tenu dans un délai minimum de vingt jours avant la signature du contrat de mettre à la disposition du franchisé un projet de contrat et un document mentionnant des informations relatives au franchiseur et à son secteur d’activité.
Les clauses minimales obligatoires faisant partie du contrat et les données minimales que doit contenir le document susvisé seront fixées par décret.
Est considéré nul tout contrat contraire aux dispositions du présent article.

Art. 16. - Le franchiseur doit :

  • être titulaire de la marque ou de l’enseigne commerciale,
  • fournir au franchisé durant la relation contractuelle l’assistance commerciale et technique et toutes les informations sincères sur le réseau de franchise.

Art. 17. - Le franchisé est tenu de fournir au franchiseur les données relatives à ses ventes et à sa situation financière et d’autoriser le franchiseur ou ses délégués, à accéder à ses locaux pendant les horaires habituels d’ouverture ou du travail.

CHAPITRE 6 - Des centrales d’achat

Art. 18. -Sans préjudice à la législation et à la réglementation en vigueur, toute personne physique ou morale peut créer une centrale d’achat dont l’objet est l’achat de produits à des prix et conditions préférentiels pour le compte des commerçants distributeurs en gros ou en détail qui y sont adhérents. Elle assure leur approvisionnement en produits selon leurs commandes.
Le commerçant distributeur peut créer une centrale d’achat afin d’acheter des produits pour son propre compte.

Art. 19. - L’adhésion aux centrales d’achat s’effectue par un contrat écrit qui fixe les obligations des parties et le taux de la commission revenant à la centrale.

CHAPITRE 7 - Des centrales d’achat

Art. 20. - Est crée un conseil national du commerce chargé notamment de :

  • examiner périodiquement la situation du secteur de commerce de distribution et émettre des avis sur toutes les questions y afférentes et présenter les propositions relatives à la promotion et au développement du secteur,
  • émettre des avis sur le programme des manifestations commerciales à caractère national et régional.

La composition et les modalités de fonctionnement du conseil seront fixées par décret.

Art. 21. -Les modes d’organisation, de classification et de fonctionnement des manifestations commerciales à caractère national et régional seront fixées par décret.

CHAPITRE 8 - Des infractions et sanctions

Art. 22. - Les infractions relatives aux dispositions de la présente loi et à ses textes d’application sont constatées par les agents suivants :

  • les agents du contrôle économique désignés conformément au statut particulier régissant le corps des agents du contrôle économique, assermentés et habilités à cet effet,
  • les officiers de la police judiciaire mentionnés aux numéros 3 et 4 de l’article 10 du code de procédure pénale,
  • les agents assermentés et habilités par le ministre chargé du commerce et appartenant au moins à la catégorie « A ».

Art. 23. - Sans préjudice aux procédures spécifiques aux officiers de la police judiciaire visés à l’article 22 susmentionné, les infractions aux dispositions de la présente loi et ses textes d’application sont constatées par procès-verbal établi par deux agents commissionnés et assermentés ayant pris part personnellement et directement à la constatation des faits qui constituent l’infraction.
Le procès-verbal doit comporter le cachet du service ou de l’administration dont relèvent les agents verbalisateurs, les noms et les signatures de ces derniers, ainsi que les déclarations du contrevenant.
Le contrevenant ou son représentant, présent lors de l’établissement du procès-verbal, est tenu de le signer. Au cas où le procès-verbal est établi en son absence ou que présent, il refuse de le signer, mention en est faite dans le procès-verbal.
Le procès-verbal doit également mentionner la date, le lieu et la nature des constatations ou des contrôles effectués et indiquer que l’auteur de l’infraction a été informé, sauf cas de flagrant délit, de la date et du lieu de la rédaction du procès-verbal et que convocation par lettre recommandée lui a été adressée ou par tout moyen pouvant laisser des traces écrites.

Art. 24. - Tous les procès-verbaux, établis et signés par les agents visés à l’article 22 de la présente loi, sont transmis au ministre chargé du commerce qui les transmet au Procureur de la République territorialement compétent.

Art. 25. - Les agents chargés de la constatation des infractions aux dispositions de la présente loi sont autorisés dans l’accomplissement de leurs missions à :

  • pénétrer, pendant les heures habituelles d’ouverture ou de travail dans les locaux professionnels. Ils peuvent également accomplir leurs missions en cours du transport des marchandises,
  • faire toutes les constatations nécessaires et se faire produire, sur première réquisition et sans déplacement, les documents, pièces ou livres nécessaires à leurs recherches et constatations et en lever copies certifiées conformes à l’original,
  • saisir ce qui est nécessaire en documents visés au paragraphe précédent ou des copies de ces documents certifiées conformes à l’original, ceux qui sont nécessaires pour l’établissement de la preuve de l’infraction ou pour la recherche des co-auteurs ou des complices du contrevenant un récépissé est délivré à cet effet,
  • procéder, dans les conditions légales, aux visites ainsi qu’à la saisie des documents dans les locaux à usage d’habitation et après autorisation préalable du Procureur de la République. Les visites dans les locaux à usages d’habitation et la saisie des documents doivent s’effectuer conformément aux dispositions du code de procédure pénale,
  • consulter et obtenir, sans opposition du secret professionnel, tous les documents et informations auprès des administrations, des entreprises publiques et des collectivités locales sur présentation d’une demande écrite du ministre chargé du commerce, et ce, sans préjudice aux secrets et informations protégés par des lois spéciales.

Art. 26. - Les agents de la force publique sont tenus, en cas de nécessité, de prêter main-forte aux agents visés à l’article 22 de la présente loi afin de garantir le bon accomplissement de leurs missions.

Art. 27. - Les agents visés à l’article 22 de la présente loi, et après avoir décliné leur qualité, peuvent procéder à la saisie réelle des produits objet d’infraction aux dispositions de la présente loi.
A cet effet, un procès-verbal de saisie est établi comportant, obligatoirement, les mentions suivantes :

  • la date : heure, jour, mois et année,
  • les noms et la qualité des agents,
  • le lieu de la constatation,
  • l’identité et la qualité du détenteur de la marchandise et, le cas échéant, l’identité et la qualité de la personne présente lors de la constatation,
  • l’assise juridique,
  • l’identification du produit saisi : sa dénomination, sa quantité, sa marque, son emballage et, le cas échéant, son poids, le numéro du lot et les dates de fabrication et de validité du produit,
  • l’identité et la qualité de la personne chez laquelle sont consignés les produits saisis,
  • les signatures des agents et de la personne présente lors de la constatation et, le cas échéant, de personne chez laquelle sont consignés les produits saisis. En cas de refus de signature, mention en est faite dans le procès-verbal.

Le procès-verbal peut comporter toutes autres mentions que les agents verbalisateurs jugent utiles aux fins de l’enquête.
Les produits saisis laissés à la garde de leur détenteur ou, le cas échéant, dans tout autre lieu choisi par les agents verbalisateurs dans la mesure où ce dernier répond aux conditions requises pour la conservation du produit.
A cet effet, les agents verbalisateurs sont tenus de délivrer au contrevenant un récépissé spécifiant la quantité et la nature des produits saisis.

Art. 28. Est puni d’emprisonnement de 16 jours à trois mois et d’une amende allant de 500 à 5000 dinars ou de l’une des deux peines seulement, quiconque tente d’empêcher ou de mettre les agents habilités à constater les infractions visées par la présente loi dans l’impossibilité d’accomplir leurs missions.

Art. 29. - L’ouverture d’un centre commercial sans l’obtention de l’autorisation prévue par l’article 10 de la présente loi , est sanctionnée d’une amende allant de 5.000 à 50.000 dinars.

Art. 30. - Le non respect des délais de payement, tel que prévus par l’article 12 ainsi que la non facturation séparée des services de coopération commerciale prévue par l’article 13, sont sanctionnées d’une amende allant de 2.000 à 20.000 dinars.

Art. 31. - Sans préjudice aux dispositions des paragraphes 2, 3 et 4 de l’article 7 de la présente loi, est puni d’une amende allant de 1.000 à 10.000 dinars, tout producteur qui, au niveau de son entreprise de production et en cette qualité, exerce l’activité de commerce de distribution en gros ou en détail.

Art. 32. - Est puni d’une amende allant de 500 à 3.000 dinars et avec la saisie du produit quiconque exerçant le commerce de détail ambulant sans avoir obtenu la carte de commerçant détaillant ambulant prévue par l’article 9 de la présente loi.

Art. 33. - Est puni d’une amende allant de 300 à 3.000 dinars, tout contrevenant aux dispositions du paragraphe 2 de l’article 5 et des articles 6 et 8 de la présente loi.

Art. 34. - Est puni d’une amende allant de 100 à 1.000 dinars, tout contrevenant aux dispositions de l’article 4 de la présente loi.

Art. 35. - Le Procureur de la République avant l’engagement de l’action publique, ou le tribunal saisi de l’affaire, peut autoriser le contrevenant à demander une transaction avec le ministère chargé du commerce ceci tant qu’un jugement définitif n’a pas été prononcé.
Durant la période d’accomplissement des procédures de transaction et la période arrêtée pour son exécution les délais de prescription de l’action publique seront suspendus. L’exécution de la transaction entraîne l’extinction de l’action publique et l’arrêt des poursuites ou du jugement ou l’exécution de la peine.
La transaction ne dispense pas le contrevenant des obligations prévues par la loi, ni de sa responsabilité civile portant dommage occasionné ou qui sera occasionné à autrui du fait de l’infraction commise.

CHAPITRE 9 - Dispositions diverses

Art. 36. - Toute personne qui exerce l’activité du commerce de distribution à la publication de la présente loi est tenue de se conformer à ses dispositions, et ce, dans un délai de six mois à compter de la date de sa publication au Journal Officiel de la République Tunisienne.

Art. 37. - Sont abrogées les dispositions de la loi n° 91-44 du 1er juillet 1991 et l’ensemble des textes qui l’ont modifiée et complétée.

La présente loi sera publiée au Journal Officiel de la République Tunisienne et exécutée comme loi de l'Etat.

Tunis, le 12 août 2009.

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