Un groupe de citoyens en sit-in le jeudi matin 23 janvier 2025 devant le siège du gouvernement à la Kasbah
Le cas d’espèce portait sur le « refus » des banques d’appliquer la disposition relative à la réduction des taux d’intérêt prévu par le nouvel article 412 ter du Code de commerce tel qu’amendé voilà plus de six mois.
L’écho du début des manifestations organisées par le collectif pour l’application des nouvelles dispositions du Code de commerce a fini par parvenir au Président qui par coïncidence ( ?) recevait le Gouverneur de la Banque centrale le 15 janvier 2025.
Finalement, finalement, il a fallu à la Banque Centrale de Tunisie bien du temps pour informer - officiellement - les banques qui se sont accrochées à l’absence d’instructions pour s’abstenir d’appliquer la loi républicaine, qu’elle n’avait aucune possibilité ni droit d’intervention de modulation ou d’atténuation des dispositions votées régulièrement dans le cadre de la Constitution de 2025 par les députés de la nation.
Quelles sont donc ces nouvelles dispositions que les banques ont rejetées ?« Les banques doivent réduire les taux d’intérêt fixes appliqués aux crédits en cours de remboursement ou aux nouveaux crédits dont la durée initiale de remboursement est supérieure à 7 ans, s’il s’avère que la valeur totale des intérêts contractuels payés par le client au cours des trois années précédant la date de la demande de réduction dépassent 8 % de l’encours du capital restant dû, compte non tenu des dits intérêts. »
A cet effet, les banques sont appelées à
« remettre aux clients dont les crédits sont éligibles, et ayant demandé cette réduction, un nouveau tableau d’amortissement dans un délai maximum de 15 jours a partir de la date de la demande.
Ce nouveau tableau d’amortissement doit reprendre et mentionner l’encours du capital restant dû, la durée restante du crédit et un taux d’intérêt égal au taux contractuel multiplié par un coefficient de 0,5. »
Source : https://chaexpert.com/tunisie-2024-reduction-taux-interets/ et https://paie-tunisie.com/412/fr/346/publications/la-nouvelle-loi-n-41-2024-relative-aux-cheques-sans-provisions-en-tunisie
Même non encore officiellement traduites par les services du Journal Officiel de la République - comme plusieurs autres textes - ces dispositions sont claires et ne nécessitent aucune précision de la part de qui ce soit et encore moins de la Banque centrale de Tunisie que le législateur n’a pas cité ni appelé à intervenir sur le sujet mais que les banques ont voulu qu’elle intervienne pour en réduire la portée voire par un artifice, en annuler les effets.
Une note (d’information) qui fera datePar
une note portant le n° 10 et datée du 23 janvier 2023, le plus bas niveau hiérarchique de textes que la Banque Centrale émet - souvent sans les porter à la connaissance du public - les « banques » ont été informées que les dispositions du second alinéa de l’article 412 ter (nouveau) du Code de commerce tel que modifié par la loi n° 41 du 2 août 2024 étaient applicable sans nul besoin de les reprendre dans une circulaire.
En effet, la Banque centrale de Tunisie a indiqué :
أحكام نافذة تستمد صبغتها اإللزامية من نص القانونوال تتطلب بالتاليا صدار البنك المركزي التونسيلمنشور تطبيقيفي الغرض
ces dispositions sont exécutoires et ne nécessitent pas de circulaire pour leur application, car elles sont directement issues du texte législatif.
Source : https://managers.tn/2025/01/24/bct-reduction-du-taux-dinteret-fixe-sur-les-credits-a-la-consommation/
Aussi, la Banque Centrale de Tunisie a-t-elle ajouté :
وتأسيسا على ذلك فإن البنوك مدعوة دون أجلإ الى اللتزام بتطبيق هذه األحكام وإيالءا لعناية الالزمة لمطالب الحرفاء المقدمة لها في الغرض والعمل على معالجتها في األجل القانوني مع الحرص على اإلجابة بطريقة معللّة على مطالب الحرفاء الذين ل تستجيب وضعيتهم للشروط القانونية
.
« invite les établissements bancaires à se conformer sans délai aux dispositions légales et à accorder une attention particulière aux demandes des clients afin de les traiter dans les délais légaux ainsi qu’à veiller à justifier les réponses aux clients dont les dossiers ne répondent pas aux critères légaux.
La fin d’une époqueLe strict contrôle que la Banque centrale appliquait depuis sa création l’a amené quasi systématiquement à reproduire dans ses circulaires, parfois au mot et à la virgule près, les textes de loi qui pouvaient émaner du ministère des Finances – en matière de réglementation des changes notamment – et des autres ministères et du gouvernement en général, afin que les banques les appliquent comme si ces dernières ne devaient ni ne pouvaient reconnaître que les dispositions des textes où figuraient à leur bas, la mention « Le gouverneur de la Banque centrale » - une forme de « Bon pour application » en quelque sorte - semble bien révolue et le droit semble avoir repris ses droits et surtout sa place dans un pays dont la devise est Liberté, Ordre, justice - حرية، نظام، عدالة.
Un double BravoBravo au nouveau gouverneur de la Banque centrale, M. Fethi Zouhaier Nouri, qui a su replacer la Banque dans les structures de l’Etat, qui désormais pourra réoccuper sa place, toute sa place et rien que sa place et sa réelle indépendance hors toute hégémonie, historiquement justifiée et pour quelques temps inutilement perpétuée.
Le temps est révolu où les banques pour échapper à certaines de leurs obligations envers leur clientèle souvent insuffisamment préparée et à l’éducation financière et bancaire limitées, prétextaient une disposition de la banque centrale qui n’existait.
Bravo au Président de la République qui a su faire respecter les hiérarchies et faire fi des baronnies qui ont le plus souvent, contribué à créer une économie de rente où grâce à la loi et par la loi, des richesses indues se sont faites et défaites au gré des alliances et des oligarchies.
« Modifié: 27 janvier 2025, 09:15:28 am 09:15 par Admin »
C’est une expérience éternelle que tout homme qui a du pouvoir est porté à en abuser. (De Montesquieu / De l’esprit des lois)