L’Infraction de corruption :
|
![]() |
PREMIERE PARTIE: COMPARAISON RELATIVE À L'INCRIMINATION |
![]() |
L’article 177 de l’ancien Code pénal visait, non les personnes chargées d'une mission de service public, mais "les citoyens chargés d'un ministère de service public", qui ont été ajoutés par la loi du 16 mars 1943. Selon la jurisprudence élaborée pour l'application de cet article, la qualité de citoyen chargé d'un ministère de service public désigne "les personnes investies dans une mesure quelconque d'une partie de l'autorité publique, et non les personnes qui ne participent pas à cette autorité, bien qu'un intérêt public s'attache à leurs servicesNote Frédéric Desportes ; J-Cl Pén : DISCRIMINATIONS PAR DES PERSONNES EXERÇANT UNE FONCTION PUBLIQUE ". Comme l'observe le professeur André Vitu, cette définition n'est pas pleinement satisfaisante puisque le critère tiré de ce que les citoyens concernés sont investis d'une partie de l'autorité publique ne permet pas de les distinguer nettement des personnes dépositaires de l'autorité publique. Avec le nouveau code pénal ces termes ont été remplacés par la « personne chargée d'une mission de service public », qui peut être définie comme la personne qui, sans avoir reçu un pouvoir de décision ou de commandement dérivant de l'exercice de l'autorité publique, est chargée d'accomplir des actes ou d'exercer une fonction dont la finalité est de satisfaire à un intérêt généralNote Vitu ; J-CL Pén art 432-11 N°57 . Ainsi, contrairement à la personne dépositaire de l’autorité publique, la personne chargée d’une mission de service public n’a, ni un pouvoir qui lui est conféré en vertu d'une délégation de la puissance publique, ni un pouvoir de décision et de contrainte sur les individus et les choses. Toutefois, cette personne est chargée d'exercer une fonction ou d'accomplir des actes qui ont pour but de satisfaire à un intérêt général. Parmi ces personnes, on citera : les syndics de faillite, les séquestres, les gardiens de scellés, les interprètesNote Cass. crim., 11 mai 1876 : Bull. crim., n° 117 , un inspecteur principal de la RATP, intervenant dans l'octroi de travaux à des entreprisesNote Cass. crim., 2 avr. 1998 note Marc Seconds Recueil Dalloz 1999, Sommaires commentés p. 158 . À cette liste, il faut ajouter les personnes qui font partie de diverses commissions instituées officiellement et chargées de donner des avis à l'autorité publique ou de statuer elles-mêmes sur des demandes, des dossiers, des projets, qui nécessitent des autorisations, des agréments ou des habilitations officielles par exemple ; les membres des commissions régionales et de la commission nationale des institutions sociales et médico-sociales, les membres des commissions qui jouent un rôle central en matière de bourse et de banque comme la Commission des opérations de bourse(C.O.B). Il faut préciser enfin que les préposés et agents des administrations placées sous le contrôle de la puissance publique, ajoutés par la loi du 16 mars 1943 à l’ancien article 177 du ACP, peuvent être considérés comme des personnes chargées d’une mission de service public. C’est le cas aussi des membres des entreprises placées sous le contrôle de la puissance publique par voie de réquisition. En effet, toutes ces personnes morales, dont le statut se rapproche sensiblement de celui des fonctionnaires publics, sont assimilées à ces derniers quant aux obligations de fidélité et de probité. L’étude de la jurisprudence récente démontre que les tribunaux répressifs n’hésitent pas à considérer une personne comme étant chargée d’une mission de service public du moment qu’elle exerce une fonction ayant pour finalité l’intérêt général. Ainsi, Un ingénieur au Commissariat à l'énergie atomique, mis à la disposition de l'Agence nationale de valorisation de la recherche, qui avait notamment pour mission d'apporter son concours à un délégué régional dans l'instruction des dossiers de demande d'aide à l'innovation, a été considéré par la chambre criminelle comme une personne chargée d'une mission de service public, au sens des articles 432-11 et 432-12 du Code pénal, dès lors qu'il était chargé d'accomplir des actes ayant pour but de satisfaire l'intérêt général, peu importe qu'il ne dispose d'aucun pouvoir de décisionNote Cass. crim., 27 févr. 2002 : Bull. crim., n° 48. . D’un autre coté, des journalistes pigistes, employés par une chaîne de service public de la communication audiovisuelle ont été considérés comme ayant la qualité de personnes chargées d'une mission de service public au sens de l'article 432-11 du Code pénal. En acceptant, des sommes d'argent des organisateurs d'une course pédestre ayant bénéficié de la diffusion de messages publicitaires, en exécution d'un pacte intervenu avant la course, ces journalistes se sont rendus coupables de corruption passiveNote Cass. crim., 19 mars 2003 note Marc Seconds Recueil Dalloz 2004, Sommaires commentés p 315. . On peut se demander si ces solutions sont identiques à celles prévues par le législateur tunisien? En droit tunisien ; l’article 82 nouveau du CPT prévoit : « Est réputé fonctionnaire public soumis aux dispositions de la présente loi, toute personne …. exerçant des fonctions auprès de l'un des services de l'Etat ou d'une collectivité locale ou d'un office ou d'un établissement public ou d'une entreprise publique, ou exerçant des fonctions auprès de toute autre personne participant à la gestion d'un service public ». On remarque que cet article prévoit quelques conditions qui permettent de parler d’une personne chargée de la gestion d’un service public. D’un coté, l’article 82 CPT fait référence à « toute personne…exerçant des fonctions auprès de l’un des services de l’Etat ou d’une collectivité locale », cette condition est prévue par le législateur en Tunisie à plusieurs reprises par des lois extérieures au code pénal comme la loi relative au statut général des personnels de l’Etat et des collectivités locales et les établissements publics à caractère administratif ainsi que d’autres textes spéciauxNote Article 17 de la loi N°112 du 12 déc 1983 relative au statut général des personnels de l’Etat et des collectivités locales et les établissements public à caractère administratif. . D’après ces textes l’exercice des fonctions auprès de l’un des services d’Etat ou des collectivités locales doit être permanent et non temporaire contrairement au droit français qui est indifférent quant au caractère permanent ou temporaire de l’exercice des fonctions. |
![]() |