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Législation-Tunisie
La responsabilité civile et pénale des commissaires aux comptes
par Lassaad Dhaouadi

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Le droit tunisien en libre accès

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Une société française qui avait pour activité l’achat et la revente de céréales, d’engrais et de produits phytosanitaires a été mise en redressement judiciaire par jugement du 29 janvier 2002 et a fait l’objet d’un plan de cession de ses actifs le 9 avril 2002.

Le commissaire à l’exécution du plan et le représentant des créanciers avaient reproché tant à la société d’expertise comptable KPMG, chargée d’une mission de présentation des comptes annuels de la société, qu’à la société Logex, chargée d’une mission de commissariat aux comptes, et au commissaire aux comptes associé de la société Logex, signataire des rapports émanant de cette dernière, d’avoir commis des fautes dommageables à l’origine de l’insuffisance d’actif.

A ce titre, ils avaient engagé une action en responsabilité pour dommages et intérêts à l’encontre à la fois de la société d’expertise comptable et du commissaires aux comptes. L’affaire est particulièrement intéressante en ce qu’elle permet de rappeler les conditions de la responsabilité de ces professionnels dans l’hypothèse d’une cessation de paiement.

En l’espèce, la Cour d’appel a conclu que la présentation fallacieuse des comptes annuels de la société par KPMG avait induit en erreur les créanciers de la société ainsi que les banques qui avaient continué à accorder leur crédit.

Cette présentation avait permis, selon la Cour d’appel, une poursuite des relations commerciales de la société avec ses partenaires, durant laquelle ces fautes avaient entrainé la poursuite de l’exploitation avec « des moyens ruineux et l’accroissement final du passif ».

Dans son arrêt du 23 mars 2010, la chambre commerciale de la Cour de cassation a approuvé la décision de la Cour d’appel en s’assurant de l’existence d’un lien de causalité entre les fautes imputées à KPMG et au commissaire aux comptes et les dommages subis par les banques et les autres créanciers.

La particularité de la décision de la Cour de cassation réside dans le fait qu’elle a conclu que « le commissaire aux comptes agissant en qualité d’associé, d’actionnaire ou de dirigeant d’une société titulaire d’un mandat de commissaire aux comptes répond personnellement des actes professionnels qu’il accomplit au nom de cette société, qu’elle qu’en soit la forme ».

Ce n’est pas la première fois que KPMG se trouve impliqué dans des affaires de présentation de faux bilans et de fraude fiscale. En 2005, il a payé, dans une transaction avec le ministère de la Justice aux Etats-Unis, une amende de 456 millions de dollars afin d’éviter un procès pénal pour avoir favorisé la fraude fiscale qui a coûté au trésor américain des milliers de millions de dollars.

En dehors de la France, les actions en dédommagement en nom collectif se succèdent au Luxembourg et aux Etats-Unis contre Ernst & Young, KPMG et PriceWaterhousseCoopers.

Ces cabinets d’audit sont accusés d’avoir certifié sans ciller les comptes de SICAV et Fonds communs de placement (Trement Group, Luxalpha, Luxinvest, Thema, Optimal, Ham…) qui ont alimenté les sociétés de l’un des plus grands escrocs de l’histoire Bernard Madoff lui permettant ainsi de monter une escroquerie d’environ 50 milliards de dollars avec trois millions de victimes dans le monde (Abu Dhabi Investment Authority, Nattenal Bank of Koweit…).

Toutes les victimes qui ont porté plainte aujourd’hui affirment avoir fait confiance à la signature de ces « grands » de l’audit et de l’expertise comptable.

Dans l’affaire Enron, Andersen, premier cabinet d’audit en ce moment, était un label de criminalité par excellence ; alors que certains profanes et complices appartenant à son réseau le considéraient comme étant un label de qualité.

L’absence de plaintes émanant d’épargnants provenant de Colombie, du Brésil, d’Italie et de Russie est une présomption sur l’origine mafieuse de certains fonds. Certainement, Bernard Maddof a aidé à blanchir de l’argent provenant de la fraude fiscale et du crime.

Dernièrement, la faillite de la banque Lehman Brothers a fait l’objet d’une expertise judiciaire ordonnée par une Cour fédérale de New York qui a pointé du doigt le cabinet d’audit Ernst & Young, chargée de la certification des comptes, qui n’a jamais décelé les artifices comptables qui ont servis au maquillage des bilans de la banque !!!

La fraude comptable était tellement flagrante que Lehman Brothers n’a pas pu trouver un cabinet d’audit prêt à certifier ses comptes et finalement, c’est Ernst & Young qui a approuvé la manœuvre comme étant légitime en vertu de la loi britannique.

En conséquence, l’auditeur légal était au courant de l’astuce « Repo 105 » dont s’est servi la banque en faisant passer des engagements trop risqués pour du capital sain.

Selon Dylan Ratigan, le journaliste qui anime l’émission de MSNBC, les scandales financiers qui ont ruiné les Etats-Unis et l’économie mondiale « n’est en aucun cas un accident, mais au contraire l’un des plus grands crimes jamais commis par un groupe de personnes, avec la complicité du gouvernement américain ».

Au vu de son rapport d’enquête de 2200 pages, l’expert judiciaire Anton Valukas a conclu que l’usage intensif de manœuvres comptables frauduleuses avec l’assentiment d’Ernst & Young aurait largement contribué à l’effondrement de Lehman Brothers. Sur le banc des accusés, il demande à faire comparaître les hauts responsables de la banque, Ernst & Young et les banques JP Morgan et Citigroup. Si justice sera faite, les « grands » de l’audit connaîtront le même sort qu’Andersen.

En Tunisie, l’article 258 du code des sociétés commerciales prévoit que le commissaire aux comptes vérifie sous sa responsabilité la régularité des états financiers de la société et leur sincérité conformément aux dispositions légales et réglementaires en vigueur. En outre, l’article 270 du même code prévoit qu’il doit informer le procureur de la république des faits délictueux dont il a eu connaissance.

En conséquence, les commissaires aux comptes ayant certifié les comptes des établissements et des banques qui ont été pillés par les familles mafieuses et leurs associés et alliés, qui ont confirmé des informations mensongères et n’ont pas informé le procureur de la république au sens de l’article 270 du code des sociétés commerciales sont passibles des sanctions pénales prévues par l’article 271 du code des sociétés commerciales (emprisonnement jusqu’à 5 ans).

Outre les sanctions pénales, les personnes lésées peuvent leur demander dédommagement devant les juridictions civiles ou en se constituant partie civile devant les juridictions pénales.

A ce titre, il y a lieu de noter que nos banques n’ont jamais actionné un commissaire aux comptes en dommages et intérêts devant les juridictions pénales ou civiles du fait qu’il a certifié de faux bilans qui les ont induits en erreur. S’agit-il dans ce cas d’un acte de mauvaise gestion qui est susceptible de recours par les actionnaires de la banque ?

Quelle est la responsabilité d’un commissaire aux comptes qui certifie les états financiers d’entreprises pillant les ressources de notre pays par le biais des prix de transfert comme c’est le cas des celles œuvrant dans le domaine de la recherche pétrolière et de la gestion hôtelière ? Quelle est la responsabilité d’un commissaire aux comptes qui certifié les états financiers d’une banque qui a procédé illégalement à la facturation des ses services avec un taux d’intérêt proche de zéro ou à la radiation de créances bancaires au profit d’une personne proche des familles mafieuses ? A ce titre, nous demandons au gouverneur de la banque centrale de rendre public la liste des personnes ayant bénéficié de radiation de créances bancaires d’une manière illégale sachant que les montants relatives à ces opérations se chiffrent à des milliers de milliards !!!

Quelle est la responsabilité du commissaire aux comptes qui certifie les états financiers d’une entreprise tunisienne sous la dénomination d’un réseau internationale d’expertise comptable qui n’a aucune existence légale en Tunisie eu égard au rôle joué par ces réseaux en matière de pillage des ressources des pays non développés par le biais des prix de transfert et la facturation fictive comme l’a confirmé le parlementaire européen et le juge Eva Jolie dans son interview au Nouvelle Observateur ?

Est-il concevable de subordonner la déduction d’une charge (provision) ou le bénéfice d’un avantage discriminatoire en violation de l’article 6 de la constitution (avance sur crédit de TVA) à la signature d’un commissaire aux comptes ? Les dispositions qui ont été prévues à ce titre au niveau des lois de finances n’ont pas de similaires dans les législations des pays développés du fait qu’elles portent atteinte au principe d’égalité et aux principes consacrés dans leurs constitutions. Est-il concevable que les désirs des familles mafieuses et leurs complices y compris ceux qui certifient les bilans de leurs sociétés prennent la forme de lois et textes réglementaires (lois de finances, loi sur l’initiative économique, loi sur la sécurité financière et autres).

A titre d’exemple, l’article 15 du code de la TVA, l’article 30 de la loi de finances pour la gestion 2011, l’article 36 de la loi de finances pour la gestion 2010, les articles 40 et suivants de la loi sur l’initiative économique, les dispositions du décret 2006-1546 et autres ont été confectionnés sur mesure pour servir l’intérêt particulier au détriment de l’intérêt général.

La législation tunisienne doit être d’urgence assainie des dispositions confectionnées sur mesure pour satisfaire les besoins et les désirs des ripoux.

Enfin, il est temps de repenser cette fonction (commissariat aux comptes) qui a occasionné des dégâts énormes aux entreprises et à l’économie tunisienne sachant qu’elle n’est obligatoire aux Etats-Unis d’Amérique et au Royaume Uni que pour les entreprises cotées en bourse.

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