Kairouan, Capitale de la Culture musulmane et les droits de la femme, aussi!

Se tiendra à Kairouan le 10 Aout 2009 et sous l’égide du ministère de la femme, la famille, l’enfance et les personnes âgées, une conférence nationale sous le thème: «La femme et ses droits: les changements du sedaq kairouanais au code du statut personnel».

Le sedaq kairouanais (الصداق القيرواني) est une œuvre juridique de légende dans l’histoire du droit musulman (tunisien). Sedaq est le nom donné au contrat (formel) du mariage. C’est un acte écrit. Le mariage en droit musulman été plutôt consensuel et n’exigeait pas une forme écrite.

Je ne suis pas certain que beaucoup de juristes connaissaient cette institution. Les cours du droit du statut personnel données aux deux facultés de droit de Tunis, au moins, ne l’ont jamais évoqué.

Et pourtant, à Kairouan, des siècles auparavant, les choses étaient différentes. Capitale islamique, la ville été aussi célèbre par sa doctrine avant-gardiste qui rompait avec un certain dogmatisme oriental. Ses jurisconsultes ont scellé depuis cette époque la nette démarcation de la Tunisie par rapport à l’orient.

Kairouan, été aussi célèbre par la beauté légendaire des ses femmes et qui étaient, en plus, cultivées et courageuses.

De ses femmes, on peut citer Khadija, fille du Imam Sahnoun; Asma, fille du Asad ibn el Fourat ou Fatima el Fahria qui ont brillé par des avis doctrinaux originaux et fortement argumentés.

Sous l’impulsion des ces femmes et autres, la kairouanaise a inventé la clause condition ou option (الشرط), déjà retenue par le CSP[1]. En orient, ils indiquent cette technique par mariage "à la kairouanaise".

En quoi consiste cette condition? Simple mais efficace: la kairouanaise mettait en annexe du contrat du mariage (le sedaq) toutes les conditions qu’elle exigeait.

Ainsi, certaines ont exigé du mari qu’il s’engage à ne pas avoir une autre épouse. Elles faisaient, donc,face à la polygamie par des moyens juridiques qu’aucune autre femme musulmane n’a osé faire.

Et si le mari ne respectait pas cet engagement ou cette clause?

La clause jouera de plein effet et la kairouanaise pourra demander soit son divorce soit le divorce de la 2ème épouse.

Certes, cette clause a été vivement critiquée par les jurisconsultes du moyen orient, mais sa pratique a été maintenue à Kairouan et ses contestataires ont été laissés au bon vent.

Le fondement juridique et philosophique de la clause été un peu complexe mais puissamment argumenté et justifié qu’il été difficile aux saints d’esprit d’en venir à bout.

Aujourd’hui, n’est ce pas une occasion de réfléchir sur la portée de notre droit du statut personnel et puiser dans notre culture juridique d’antan pour chercher à mieux argumenter nos choix et leur trouver le meilleur fondement possible?

Cantonner la valeur de la femme tunisienne en ses droits transcrits au CSP ou autres lois c’est la condamner à rester hors de la sphère mentale de la société ce qui anéantit tout acquis.

On reste toujours étonné de ce discours qui ne change jamais et qui colle la valeur de la femme aux seuls textes de la loi.

Les droits de la femme étant constitutionnellement et juridiquement affirmés. Sa place dans la société étant politiquement consolidée, c’est un autre travail délicat et de toute autre nature à entamer, aujourd’hui: enraciner cet imposant arsenal politico-juridique dans la mentalité.

Une mentalité qui rétrograde (dans le subconscient) la femme et ses acquis est une tumeur maligne et dangereuse pour la femme, la société et tout le pays.

Et il n’y pas de meilleur acteur pour mener à merveille cette tache que la femme tunisienne elle-même dont l’homme tunisien continue toujours à éprouver un grand sentiment d’admiration. Si on y ajoute plus du respect, de la considération et la conviction de son rôle important et déterminant dans la société, la femme tunisienne aurait acquis une valeur que rare une femme dans l’histoire en aurait bénéficié.


[1] – Retenu, mais dérivé et rarement mis en oeuvre.

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